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Afghanistan, vers une nouvelle guerre civile ?

Dernière mise à jour : 29 nov. 2020

Ces dernières semaines, l’actualité à été marquée par plusieurs attentats islamistes, dont le dernier en date à frappé Vienne le lundi 2 novembre, faisant 4 morts et 14 blessés. Le même jour, des assaillants pénétraient l’université de Kaboul avec des explosifs et des fusils d’assaut. Ils ont tué 22 personnes et en ont blessé presque autant. C’est le deuxième attentat revendiqué par l’organisation État Islamique qui frappe Kaboul en deux semaines. Le premier avait eu lieu le 24 octobre et avait tué 43 élèves d’une école de la ville. Outre la symbolique des lieux d’éducation visés, la létalité et le rapprochement dans le temps de ces attaques interpellent en Afghanistan. Alors que les négociations qui se déroulent à Doha entre le gouvernement Afghan et les talibans sont enlisées, les voix s’élèvent pour dénoncer la faiblesse de l’état dans ce pays qui est habitué aux attentats, en particulier à cause des talibans.



L’une d’elles résonne particulièrement : il s’agit de celle d’Ahmed Massoud, le fils du fameux commandant qui avait affronté l’URSS puis les talibans entre 1996 et 2001 ; il avait été tué par Al-Quaïda deux jours avant l’attentat du World Trade Center. C’est dans un autre pays anglophone, l’Angleterre, que son fils s’est formé. Après avoir étudié les sciences politiques et être passé par la prestigieuse académie militaire de Sandhurst, ce dernier est de retour au Panshir, région tadjike du nord-est Afghan restée hors d’atteinte des talibans. Dans ce qui a été le berceau de l’insurrection du « lion du Panshir », les négociations de Doha sont mal vues. On s’insurge contre les talibans qui imposent leur volonté à un état jugé trop faible, et même le négociateur Afghan, Abdullah Abdullah, originaire de la région et ami d’Ahmed Massoud, est jugé inefficace. On craint aussi qu’à l’issue des négociations, et avec le retrait complet des forces américaines prévu pour le 1er mai prochain, les talibans fassent main basse sur le pays, entraînant potentiellement une flambée de violences. L’autonomie de cette région vis-à-vis des talibans et son sentiment de discrimination quand bien même plusieurs Panshiris appartiennent au gouvernement, dont le vice-président Amrullah Saleh, renforcent la volonté de ces tadjikes de prendre leur destin en main, et d’affronter les talibans si besoin. Ahmed Massoud lui-même ne s’en cache pas, si la situation dégénère, il se battra de toutes ses forces pour ne rien se faire imposer par les talibans. Mais en attendant, depuis son bureau à Kaboul, il multiplie les rencontres de personnalités politiques Afghanes et étrangères, et cherche l’appui de différentes provinces pour peser sur les négociations.

Le risque semble donc réel que si ces dernières échouent, une nouvelle guerre civile puisse éclater, dans laquelle le Panshir pourrait de nouveau jouer un rôle de premier plan. Mais malgré les difficultés de Doha, l’issue guerrière ne semble pas acquise. Pour l’instant, les négociations sont au point mort et semblent loin d’aboutir. Si cela contribue à l’affaiblissement de l’état et à la multiplication des violences sur son sol -un rapport des Nations Unies daté de fin octobre a souligné ce regain de violences depuis le début des négociations-, ça signifie aussi que l’issue n’est pas encore décidée. D’autant que la récente élection de Joe Biden pourrait redistribuer les cartes en retardant le départ des troupes américaines ou en pesant sur les négociations directement. Notons par ailleurs l’émergence potentielle d’un nouvel acteur, l’organisation État Islamique, qui comme on l’a vu est assez influente dans la région pour la déstabiliser encore plus. Tous les ingrédients sont donc là pour que la situation dégénère de nouveau dans ce pays déstabilisé depuis plus de 20 ans, et d’une manière on l’a vu presque cyclique. Cependant, la situation est belle et bien différente de l’époque du lion du Panshir, et avant de mener une nouvelle révolte, son fils, bien que pessimiste, fait de son mieux vaincre les talibans à la table des négociations.


Benjamin Milkoff

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