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Europe de l’Est : la remise en cause de l’hégémonie Russe

Dernière mise à jour : 10 déc. 2020

Il y eut d’abord la Biélorussie. Dimanche 25 octobre, plus de deux mois après le début des manifestations contre le président Loukachenko, l’ultimatum lancé par la principale opposante Svetlana Tikhanovskaïa, appelant au départ de ce dernier et à la libération des prisonniers politiques, touchait à sa fin sans succès. Une nouvelle vague de répression frappait dans la foulée un mouvement qui persiste malgré tout à réclamer la fin d’un gouvernement autoritaire hérité de la chute de l’URSS. Six jours plus tard, les Géorgiens étaient appelés à voter pour des législatives opposant le parti Rêve Géorgien, omniprésent à toutes les échelles du pouvoir à la manière du parti communiste de l’ancienne République Soviétique, à un front uni de l’opposition déterminé à en finir avec cette pratique du pouvoir malgré des dissensions de taille. Les résultats provisoires donnent le parti au pouvoir gagnant d’une courte tête, mais l’opposition dénonce déjà une falsification massive des bulletins. Cette situation n’est pas sans rappeler celle de la Biélorussie, d’autant que pour la première fois l’opposition est parvenue à faire front commun contre le pouvoir. Enfin, le 1er novembre, ce sont les Moldaves qui élisaient leur futur président, ayant à choisir entre la voie pro-russe incarnée par Igor Dodon et la voie pro-européenne portée par Maia Sandu, entre un candidat socialiste et une candidate réformiste.


Manifestation indépendantiste place Maïdan à Kiev, 2014

De ces trois mouvements semble émerger une tendance à la fin de la domination Russe sur ce qui a été les satellites de l’URSS pendent un demi-siècle. Cela fait désormais 4 pays avec l’Ukraine proches de la frontière occidentale Russe qui remettent en question l’hégémonie de cette dernière, et si aucune n’a encore rencontré de franc succès - l’Ukraine est occupée, empêtrée dans une guerre meurtrière et son opinion publique est coupée en deux sur la question, tandis qu’en Biélorussie malgré la massivité du mouvement démocratique Loukachenko semble intouchable - leur accumulation pourrait être le signe d’un chavirement politique en Europe Centrale et dans le Caucase.

La question du drapeau en Biélorussie est symbolique de la volonté remarquablement unanime de la population de se défaire de l’héritage communiste avec au premier chef la dictature de Loukachenko. Les manifestants en effet brandissent un drapeau aux couleurs blanc rouge blanc, qui fut utilisé au cours de deux brèves périodes de l’état Biélorusse : l’éphémère République Populaire Biélorusse (1918) et les premières années de la République de Biélorussie, consécutives à la chute de l’URSS et antérieures à l’élection d’Alexandre Loukachanko. Ces couleurs sont l’emblème d’un passé antérieur au communisme puisque moyenâgeux -elles font référence au Grand-duché de Lituanie-, tandis que le drapeau actuel vert et rouge est directement hérité de l’URSS. Le drapeau des manifestants tant d’un point de vue historique que politique nie le passé communiste de la Biélorussie et illustre la volonté de ses défenseurs d’en faire table rase pour construire un autre état biélorusse. C’est cette aspiration à faire table-rase du passé communiste qui marque les mouvements cités plus haut.

Et dans cette lutte, ces états trouvent en l’Europe un allié impuissant. L’UE à en effet usé de ses armes tant pour l’Ukraine que pour la Biélorussie : elle a condamné, elle a sanctionné, elle a tapé du point sur la table. Mais l’échec de ces états est aussi celui de l’Union Européenne qui ne peut qu’observer avec intérêt ces pays prêts à basculer dans son giron et affaiblir par là-même la Russie. Le récent empoisonnement de l’opposant russe Alexeï Navalny, à un moment ou la contestation Biélorusse menaçait de contaminer une partie des Russes, a encore illustré l’incapacité de l’UE à faire respecter l’état de droit à la Russie.

L’actualité récente montre donc une certaine tendance à l’affaiblissement de l’hégémonie Russe en Europe Centrale et dans le Caucase, avec en fond le combat d’états récents avec leur passé. Il ne faut cependant pas extrapoler : l’exemple Ukrainien montre que toutes les populations ne sont pas unanimes, et la question se pose rarement en des termes aussi simples que choisir entre Russie et indépendance. L’Union Européenne quant à elle, bien que totalement impuissante, à un intérêt dans ces troubles, tant symbolique que politique, et reste en embuscade. L’avenir des anciennes Républiques Soviétiques est encore flou, mais il semble qu’il ait pris un nouveau virage l’éloignant un peu plus de l’héritage soviétique.


Benjamin Milkoff

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