
Vue du projet en 2018
Sur le papier, le projet était alléchant. Grand Paris Aménagement (GPA) reçoit en 2014 la mission d’aménager un éco-quartier sur les 58 hectares du parc de l’ancien hôpital psychiatrique de Maison Blanche, à Neuilly-sur-Marne. Avec ses 4200 logements, ses écoles, ses commerces, c’est une ville dans la ville qui doit voir le jour tout près de Paris. Les projections évoquent jusqu’à 20 000 nouveaux habitants, pour une ville en comptant 36 000. Mais quand les choses se sont compliquées, les acteurs locaux ont été contraints d’intervenir eux-mêmes.
Premier accroc : il est vite apparu que la station de métro, prévue au pied du quartier dans le cadre de l’extension de la ligne 11 par Grand Paris Express (GPE), ne verrait peut-être jamais le jour faute de financement. C’était pourtant un des principaux arguments dans la promotion des premiers appartements vendus en 2017. Sa mention a depuis été remplacée sur les panneaux par la prudente promesse de « renforcement de la densité de transports ». Ce revers, indépendant du projet de Maison Blanche, nécessite une première adaptation, le réseau de transports actuel ne pouvant absorber 20 000 nouveaux venus. Cela explique en partie la volonté de M. Bakhtiari, le maire élu en juin dernier, de redimensionner tout l’éco quartier : « idéalement, je pense qu’on pourrait envisager de construire moitié moins de logements », confie-t-il.
Car au-delà de ce faux départ de GPE, c’est tout le projet qui est mal pensé selon lui. Si près de 500 appartements ont été livrés depuis l’été dernier, les les écoles et les commerces promis manquent encore. Pour le maire, « ce projet prévoyait une urbanisation excessive et très dense, et n’avait d’écologique que le nom. On ne peut pas non plus accepter que les logements soient livrés avant les équipements nécessaires. Il faut tout reprendre ». C’est pourquoi il négocie avec GPA, dans le cadre de la deuxième phase de travaux actuellement en cours, pour que les immeubles s’élèvent à 5 étages et non 7, qu’ils soient dotés de toits végétalisés et plus espacés.
M. Bakhtiari n’est pas le seul à vouloir redimensionner l’éco quartier : il a trouvé dans l’association de résidents du parc de Maison Blanche une alliée déterminée. Michel (ce prénom a été modifié) fait partie de son comité de direction. Il a emménagé en juillet dernier mais savait déjà en achetant que le métro ne se ferait sûrement pas, « nos vendeurs ont été plus honnêtes que d’autres ». Il décrit une « colère froide, et pragmatique » à l’égard des promoteurs qui ont conçu le projet initial. Il préfère pourtant insister sur le « positif ».
« On est tous un peu de la même tranche d’âge dans l’association, on est devenus amis. » glisse-t-il, avant d’ajouter « on essaye de soulever des problèmes et de proposer des solutions pour mettre en branle les différents acteurs. Ça demande beaucoup de travail mais on est très soudés ». Le maire leur accorde désormais une réunion tous les deux mois, et Michel s’estime « satisfait » de ce dialogue, même s’il « souhaiterai(t) un peu plus d’initiatives de la part de la municipalité ». En tout cas, tous s’accordent à dire que le projet va désormais dans le bon sens, sous leur impulsion. Et une chose est sûre : si la construction de l’éco-quartier ne doit pas s’achever avant au moins 2031, les habitants eux n’ont pas attendu pour se l’approprier.
Benjamin Milkoff